Attentat de Juvénal Habyarimana : tsunami judiciaire !

Bruno Gouteux - 10/01/2012
Image:Attentat de Juvénal Habyarimana : tsunami judiciaire !

Un rapport technique qui fait basculer l’histoire !
Si ce n’est pas le FPR, qui a tiré les missiles ???

« C’est un tsunami judiciaire qui a emporté mardi après-midi l’enquête menée par le juge « antiterroriste » Jean-Louis Bruguière sur l’attentat ayant visé l’avion du président du Rwanda Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994. Du monstrueux empilement de témoignages à charge qui avait abouti en 2006 à neuf mandats d’arrêt contre les hauts gradés de l’Armée patriotique rwandaise, il ne reste pratiquement rien debout » nous annonce Christophe Rigaud (lire l’article), qui publie par ailleurs sur son site une excellente série d’articles de Jean-François Dupaquier (Rwanda : Retour sur l’attentat qui fit un million de morts) sur l’attentat d’Habyarimana.

« Un rapport technique qui fait basculer l’histoire », titre Colette Braeckman sur son blog, Le carnet de Colette Braeckman, ce mardi 10 janvier.

Selon les experts, qui ont procédé à des analyses balistiques, les tirs qui ont abattu l’appareil provenaient du camp militaire de Kanombe, qui entourait la résidence du chef de l’Etat. C’est d’ailleurs dans le jardin même de la famille Habyarimana, au bord de la piscine, que l’avion s’est écrasé. Ce camp militaire, étroitement protégé, était le domaine exclusif de la garde présidentielle, composée des fidèles du chef de l’Etat chargés de sa sécurité. Y vivaient aussi des coopérants militaires français chargés de la formation des soldats rwandais et des coopérants militaires belges qui travaillaient à l’hôpital militaire de Kanombe.

La journaliste belge, l’une des première à avoir mis en cause les extrémistes du « Hutu Power » dans cet attentat, de conclure : « En écartant la colline de Masaka comme le lieu de l’attentat, les experts ont automatiquement exonéré le FPR, qui était dans l’incapacité de pénétrer dans le camp présidentiel. Si les avocats de ce dernier ont manifesté leur satisfaction et espèrent que leurs clients (les neuf dirigeants rwandais inculpés) bénéficieront d’un non lieu, l’enquête n’est pas terminée pour autant : s’il sait d’où les tirs sont partis, le juge Trevidic doit encore rechercher les auteurs de l’attentat, découvrir qui se trouvait, le soir du 6 avril, dans l’enceinte du camp de la garde présidentielle… »

Christophe Rigaud (Afrikarabia), précise également que « les expertises balistiques et phoniques commandées par ses successeurs les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux démontrent que les deux missiles qui ont abattu l’avion le 6 avril 1994 vers 20 h 30 n’ont pu être tirés par un commando du Front patriotique infiltré sur la colline de Masaka. Les tireurs se trouvaient au camp Kanombe sévèrement contrôlé par les Forces armées rwandaises. Ce camp était sous le contrôle du major Aloïs Ndabakuze, chef des parachutistes commandos de l’armée rwandaise, condamné en première instance par le Tribunal Pénal International (TPIR) à la prison à vie pour son rôle crucial dans le génocide. »

L’enquête continue... des questions se posent

Malgré son extrême faiblesse, la thèse de Bruguière avait été largement répercutée, en France, par des médias et des journalistes complaisants, ayant même mené à l’inculpation de neuf hauts dirigeants rwandais.

Les expertises livrées aujourd’hui innocentent donc le Front patriotique Rwandais (FPR) et les 9 rwandais inculpés par le juge Bruguière.

Mais, comme le souligne Colette Braeckman, « le juge Trevidic doit encore rechercher les auteurs de l’attentat »...

Dans le rapport qu’ils livrent aujourd’hui à la justice française, les experts estiment que les tireurs étaient très expérimentés, relançant l’hypothèse de l’intervention de spécialistes étrangers des missiles, qu’il s’agisse d’agents secrets (français ?), de militaires étrangers (français ?) ou de mercenaires (français ?)...

Mais surtout, aujourd’hui, que dire de « l’enquête » du juge Bruguière ? Peut-on aujourd’hui affirmer, comme nous invitaient à le penser Georges Kapler et Jacques Morel dans la revue La Nuit rwandaise, que Jean-Louis Bruguière a ridiculisé la justice française en l’instrumentalisant ?

Bruno Gouteux est journaliste et éditeur —Izuba éditions, Izuba information, La Nuit rwandaise, L’Agence d’Information (AI), Guerre Moderne, Globales…—, consultant —Inter-Culturel Ltd— et dirige une société de création de sites Internet et de contenus —Suwedi Ltd.

Il est engagé dans plusieurs projets associatifs en France et au Rwanda : Appui Rwanda, Distrilibre, Initiatives et Solutions interculturelles (ISI), le groupe Permaculture Rwanda, Mediarezo

 10/01/2012

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