Vers une nouvelle dévaluation du Franc CFA ?

10/02/2012
Illustration: Vers une nouvelle dévaluation du Franc CFA ?
Vers une nouvelle dévaluation du Franc CFA ?
 10/02/2012

Sanou Mbaye, économiste sénégalais et ancien haut fonctionnaire de la Banque Africaine de Développement [BAD], nous fait part de rumeurs de dévaluation en Zone franc (journal Enquête, n°198 du dimanche 5 février 2012).

Selon lui, étant donné que « la France est aux prises avec une dette et un déficit qui ont entrainé la revue à la baisse de sa note financière », elle « fait face à une menace de récession et doit se soumettre à un programme drastique d’austérité pour résorber ses déficits. »

Il nous fait ainsi part des « rumeurs de plus en plus persistantes » concernant « une éventuelle dévaluation du franc CFA », découlant de la situation économique française.

La zone CFA, simple excroissance de l’économie française

« Par le biais des modalités de fonctionnement de la Banque centrale et des autres institutions de la zone franc, les économies des pays de cette zone sont de fait des excroissances de l’économie française. »

Sanou Mbaye rappelle qu’« une dévaluation du franc CFA a toujours résulté moins d’une analyse des fondamentaux macroéconomiques des pays de la zone franc que d’une décision unilatérale de la France. Celle-ci est passée maîtresse dans l’art d’utiliser la dévaluation comme outil pour accroitre sa compétitivité et son commerce extérieur. »

Enfin, il nous met en garde contre une « implosion de la Zone franc », « porteuse de nombreux risques de déstabilisation ».

Sortir de la tutelle monétaire coloniale

Il nous livre néanmoins ce qui, selon-lui, pourraient constituer deux scénarios possibles :

" Le premier consisterait pour chacun des pays de la zone franc à s’affranchir de la tutelle de la France et à battre sa propre monnaie. Ce serait la suite logique de la décision paradoxale et insensée de ces pays de démanteler en 1960 les structures fédérales qui les unissaient tout en préservant une monnaie commune. Les obstacles à cette démarche sont relatifs au droit de veto de la France et au manque d’intérêt des petits pays de la zone franc qui préfèrent la formule de mise en pool des réserves de change à celle de l’affranchissement qui les laisserait avec de faibles niveaux de réserves rendant leurs économies encore plus vulnérables aux chocs extérieurs.

Le second consisterait à reformer le système. Il s’agirait d’arrimer le franc CFA non pas seulement à l’euro mais à d’autres monnaies comme le dollar, le renminbi, le yen ou la livre sterling, de mettre fin à sa convertibilité, d’assouplir les politiques de crédit et d’accélérer le processus d’intégration régionale. L’ennui avec cette approche est que la greffe d’un programme d’intégration économique sur une union monétaire artificielle préexistante est difficilement praticable. Une monnaie commune implique des politiques fiscales et monétaires centralisées et unifiées, qui nécessitent elles-mêmes une intégration politique ce qui, comme les difficultés de l’euro l’ont démontré, n’est pas aisément établie entre des États nations."

Pour conclure, notons que Sanou Mbaye, qui n’a jamais caché que selon lui la BAD n’était rien d’autre qu’une machine à financer les exportations occidentales en Afrique, rappelle que « les pays de la zone franc se révèlent incapables de prendre le train de la croissance au moment même où nombre de pays d’Afrique traversent la période économique la plus prospère de leur histoire. Depuis 2000, ils ont réalisé une croissance économique moyenne de 5-7 % comparée à 2,5-3% pour les pays de la zone franc. »

Va-ton profiter de la situation économique française pour enfin sortir de la tutelle monétaire coloniale ?

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A lire également :

• Faut-il dévaluer le franc CFA ? (Kako Nubukpo, 12/12/2011)

• Le Dossier « France CFA » d’Izuba