André Elbaz, un peintre de la Cité

Abdelali Najah - 15/04/2011
Image:André Elbaz, un peintre de la Cité

La Cité moderne est-elle un bon modèle de la postmodernité ?
« l’aimance des couleurs et l’accoutumance des lumières »

La Cité a toujours été une thématique artistique omniprésente dans la peinture d’André Elbaz, une peinture émerveillée et fascinée par l’aimance des couleurs et l’accoutumance des lumières.

Une médina sinistrée et dévastée où les maisons sont renfermées, repliées et abandonnées après une bataille dure et acharnée. Les murailles ocre empêchaient son écoulement dans le seuil d’un vaste océan. La peinture rigoureuse et labyrinthique d’André nous enseigne que la lumière est derrière nous et pour la saisir, notre regard doit s’accoutumer à un monde clos, ascendant et symétrique.

Comme dans un rêve angélique, la médina s’ouvre peu à peu à l’œil ensommeillé. Des maisons qui valsent et des fenêtres qui dialoguent. Les murs rayonnent de couleurs qui rajeunissent. Des vaguelettes frôlent les giroflées des murailles.

Un joyeux en-vie s’envole et un gai silence fraye les sentiers battus et sans issus.

Nietzsche disait dans « La naissance de la tragédie » que l’art doit surtout et avant tout embellir la vie, nous rendre donc supportables et, si possible, agréables aux autres : cette tâche sous les yeux, il nous modère et nous tient en bride, crée des formes de civilité, lie des êtres sans éducation à des lois de convenance, de propreté, de courtoisie, leur apprend à parler et se taire au bon moment.

André Elbaz s’intéresse aux limites, aux seuils et aux traces

André Elbaz s’intéresse aux limites, aux seuils et aux traces pour montrer non pas la coupure et la séparation, mais plutôt la con-jonction des choses. Il cherche une nouvelle gamme de métaphores symboliques et par la suite, une nouvelle conjonction de ces symboles afin de saisir l’invisible du monde pour démontrer la réalité.

L’urbanisation atteint un niveau critique. Elbaz cherche un équilibre entre la tradition et la modernité mais en vain, car la modernité sociale et celle de l’esprit font défaut à la Cité qui atteint un haut niveau de saturation matérielle. La menace de l’urbanisation sans limite emmène vers une dégradation générale et totale de l’écosystème, et les développements économiques, matériels et techniques entrainent une sorte de compartimentalisation de l’in-dividu et poussent encore plus vers l’aliénation profonde.

Un constat est sûr : la modernité est l’aliénation de l’homme. Un regard critique et politique sur la Cité harmonisant ainsi l’esthétique et le politique.

L’intellectuel japonais Kolin Kobayashi disait que la domination de la nature par la raison instrumental dérive vers la domination de l’humanité elle-même. Le savoir de la domination de la nature a la même origine que celle du pouvoir pour la domination des humains.

Quand la techno-science dépasse largement le prolongement du corps humain, c’est le déclin de la civilisation. Les scientifiques conçoivent des techniques et des machines sans savoir exactement quelle conséquence cela peut avoir dans le futur. La modernité a perdu le lien entre l’être humain et la nature. Nous sommes une partie de la nature mais pas en dehors de la nature. Quand l’humanité aperçoit ses limites et celles du monde, elle commence à s’autodétruire.

La Cité moderne est-elle un bon modèle de la postmodernité ?

Écrivain et Journaliste.

Je suis marocain. J’ai fait des études en sociologie au Maroc (Université Mohamed 5) et en France (Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis).

 15/04/2011

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