La fascination pour le Rwanda est à l’origine d’une littérature d’une abondance surprenante si on l’évalue à la seule aune de l’exiguïté du pays des milles collines. Une bibliographie publiée en 1987 recense 5500 publications consacrées à ce pays depuis 1863. Depuis 1994, plus de 2000 ouvrages se sont ajoutés à cette considérable bibliothèque virtuelle.
Or, loin d’apporter une clarté sur l’histoire du Rwanda, cette profusion est pour le chercheur un dédale redoutable. Le lecteur est confronté à une littérature piégée par la permanence de postulats rarement questionnés. La récurrence des clichés sur la tripartition Hutu, Tutsi, Twa, la longévité des préjugés hérités de l’anthropologie missionnaire et coloniale par le jeu des citations entrecroisées des auteurs ayant fait autorité à leur époque, confère une « légitimité » trompeuse à de trop nombreux fantasmes.
Le retour aux sources des traditions orales, l’interrogation de la langue rwandaise comme creuset et palimpseste de l’histoire et la culture des Banyarwanda, et le questionnement des contextes d’énonciation des écrits à prétention historique et ethnologique sur le Rwanda et ses habitants ouvrent la voie à une toute autre écriture de l’histoire du peuple rwandais. L’ouvrage Les enfants d’Imana témoigne d’un effort à poursuivre pour « décoloniser » l’histoire du Rwanda.