Annie Faure répond au Nouvel Observateur

La rédaction - 28/07/2011
Image:Annie Faure répond au Nouvel Observateur

Rwanda : viols de militaires français pendant Turquoise
« absurde et tendancieux »

« La grenade dégoupillée, c’est le silence, c’est l’omerta sur la complicité de la France au génocide des Tutsi ; Ce n’est pas la vérité - si cruelle soit elle - pour notre armée et ses dirigeants. »

Annie Faure, qui représente en France trois femmes Tutsi qui accusent des militaires français de les avoir systématiquement violées en 1994 revient sur certains aspects de l’article que Sarah Halifa-Legrand du Nouvel Observateur (Rwanda : l’armée française accusée de viols collectifs) a consacré à ces plaignates.

A lire sur ce site :

Appel de fonds : trois plaintes pour viols contre des militaires français de l’opération Turquoise

J’ai lu avec attention l’article consacré aux plaintes des 3 femmes Tutsi, « Françoise », « Diane » et « Olive. » En tant que représentante en France de ces trois Rwandaises, certains points m’étonnent et me choquent.

Tout d’abord, le chapeau de l’article est absurde et tendancieux.

Absurde : le génocide Hutu est un non-sens.

Tendancieux : la question : info ou intox ? avec son air de ne pas y toucher, discrédite d’emblée les 3 plaintes.

Au cœur de l’article, il est affirmé à partir des « documents » (???) qu’il n’y avait finalement rien dans les plaintes de 2004 qui évoquaient la systématisation des viols sur les femmes Tutsi.

Dans ce cas, pour quelles raisons la juge Florence Michon aurait initié en avril 2010 une instruction pour « Crime contre l’Humanité » et pour « Participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime contre l’Humanité » ?

Pour quelles raisons, la Chambre d’Instruction ce 13 septembre 2010 aurait rejeté l’appel du Parquet en mai 2010 qui réclamait justement une nouvelle qualification du crime, c’est à dire une qualification de « viol simple » et non en « crime contre l’humanité » les grossièretés sexuelles des soldats.

Pourquoi avoir omis d’informer les lecteurs de cet appel du Parquet et son rejet ?

Pour quelles raisons me battrais-je depuis 7 ans si je n’étais pas convaincue par la séméiologie des plaintes et la crédibilité de ces femmes ?

Pourquoi ce discrédit jeté sur les témoins en les qualifiant de « sujets à caution ». Ce ne sont pas « des miliciens qui attendaient leur jugement », mais des militaires qui purgeaient leur peine et un réfugié des camps, témoin accablé des viols et des réquisitions des femmes.

Ces témoignages sont factuels, détaillés et concordants.

Ces témoignages sont factuels, détaillés et concordants.

Le terme « amplification fantasmatique du traumatisme » est gratuit et insultant : le point d’interrogation n’enlève pas son caractère diffamatoire. Comment peut-t-on traiter ces femmes de la sorte ? Pourquoi une telle dérive machiste ?

Je n’ai pas au Rwanda recueilli « des témoignages qui ont servi de base aux plaintes ». J’ai recueilli des plaintes, tout simplement, des plaintes de femmes Tutsi brisées, en quête de justice, des plaintes destinées à leur avocat Maitre Antoine Comte.

Enfin, il est affirmé que « cette affaire dégoupille une grenade de plus dans les relations déjà minées entre Paris et Kigali ».

C’est faux.

La grenade dégoupillée, c’est le silence, c’est l’omerta sur la complicité de la France au génocide des Tutsi ; Ce n’est pas la vérité - si cruelle soit elle - pour notre armée et ses dirigeants.

Quant à l’Universitaire Gérard Prunier - avec tout le respect que je lui dois - il ne s’est intéressé à ma connaissance depuis 2004 ni de près ni de loin à ces plaintes.

Les inepties du chapeau ont contaminé l’article : celui-ci hésite, troque d’un paragraphe l’autre un habit de journaliste contre une robe du juge puis de l’avocat de l’armée française.

On dirait que la journaliste danse d’un pied sur l’autre.

Qui au Nouvel Observateur fait valser la vérité ?

Annie Faure

Vidéo :

Annie Faure développe l’historique de ces plaintes lors du colloque
« Transmettre la Mémoire » à Médecins du Monde (62, rue Marcadet, 75018)
le dimanche 18 avril 2010.


Annie Faure est médecin humanitaire au Rwanda en 1994.
Elle est l’auteur de « Blessures d’humanitaire ».

A lire sur ce site :

Appel de fonds : trois plaintes pour viols contre des militaires français de l’opération Turquoise

Sur le site du Nouvel Observateur :

Rwanda : une réaction à un article du Nouvel Observateur

Rwanda : l’armée française accusée de viols collectifs (article a été publié dans Le Nouvel Observateur daté du 13 juillet 2011)

Pour contacter les Éditions Izuba et proposer un manuscrit, c’est ici

L’équipe Izuba Information
Vous voulez :
• Proposer un article ;
Demander des informations sur notre activité, notre collectif ;
Signaler un contenu problématique (articles ou sites référencés, textes publiés par les auteurs) (merci de bien nous préciser l’adresse (url) de la page concernée) ;
Participer à « la vie » du site (devenir administrateur d’une rubrique [dossier, info pays, ...] ;
• ... ou tout simplement nous poser une question ou nous signaler un dysfonctionnement,
utilisez le formulaire ci-dessus.
Vous recevrez une réponse rapidement.
Merci.
— L’équipe Izuba Information

 28/07/2011

 Vos commentaires

Articles référencés 

O. NGENZI & T. BARAHIRA :Premier procès en 2016
31/07/2016
Rwanda 1994 : « Un génocide sans importance ? »
8/07/2016
Procès Ngenzi/Barahira : arrêts officiels de la cour d’assises
7/07/2016