Burundi: les signes avant-coureurs d’un génocide politico-ethnique

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À mes compatriotes burundais, aux citoyens du monde
“des crimes contre l’humanité sont commis au quotidien et le monde observe”

Peu après l’expiration de l’ultimatum lancé par Nkurunziza, je lance ce cri d’alarme, le peuple burundais dans son ensemble est en danger. Tout le monde sait très bien qu’un génocide politico-ethnique est en cours au Burundi.

A part des discours, des communiqués, des mots, des résolutions, des négociations annoncées mais qui ne commencent pas, etc. tout semble indiquer que le peuple burundais est abandonné à lui-même.

Un terrorisme d’Etat a été instauré et des crimes contre l’humanité sont commis au quotidien et le monde observe. Pauvre Burundi !

L’Histoire récente est pourtant riche en leçons, en la matière. Tous les génocides : celui des juifs, des Arméniens et récemment des Tutsi au Rwanda ont été préparés et exécutés par les pouvoirs en place. Ces pouvoirs ont utilisé les moyens de l’État, mais aussi leur armée et leurs miliciens pour commettre ces crimes abominables qui ont emporté des milliers, voire des millions de citoyens innocents.

Le schéma est toujours le même. Pour le cas du Burundi, des preuves irréfutables montrent qu’un génocide politico-ethnique se prépare depuis belle lurette.

1. Nkurunziza et son parti CNDD-FDD contrôlent tous les organes étatiques et sécuritaires, y compris l’armée et la police depuis plus de dix ans. Dès le lendemain de sa prise de pouvoir, Nkurunziza et son parti ont créé une milice Imbonerakure composée par les jeunes affiliés au parti, mais aussi les anciens combattants, les démobilisés FDD.

Deux hauts cadres du parti CNDD-FDD – dont l’ancienne Vice-Présidente de la République – affirmaient déjà en 2006, que les miliciens étaient au nombre de 30.000.

D’après le site web « Burundi news », certains miliciens étaient envoyés au Soudan où ils s’entrainaient avec les Janjawid [1]. L’armement et les entrainements de la milice Imbonerakure ont bien continué jusqu’à la création d’une journée dédiée aux anciens combattants en 2011 [2] au cours de laquelle les miliciens défilaient en tenue presque militaire et comme des militaires. Plusieurs rapports [3] ont épinglé le comportement de ces miliciens depuis des années dénonçant leur comportement sous l’œil complice des forces de l’ordre. L’on se souviendra que ces Imbonerakure ont été envoyés pour s’entraîner en République Démocratique du Congo à Kiliba Ondesi [4]. Le Président de APRODH Pierre Claver MBONIMPA est en train de payer le prix pour avoir dénoncé ces entrainements : sa famille ne cesse d’être décimée !

2. Le 8 avril 2014, Jeffrey Feltman, sous-secrétaire général chargé des affaires politiques a informé le Conseil de sécurité évoquant des rapports récents faisant état de « l’armement et de l’entrainement de la jeunesse du parti au pouvoir, Imbonerakure ». L’un de ces rapports, c’est le document confidentiel [5] daté du 3 avril adressé aux départements des affaires politiques et du maintien de la paix de l’ONU, ainsi qu’aux envoyés spéciaux pour la région des Grands Lacs des Nations Unies et des États-Unis.

3. Aujourd’hui, ce n’est plus un secret pour personne, les Interahamwe qui ont commis le génocide contre les Tutsi au Rwanda sont bien installés au Burundi et ont été intégrés à l’armée, à la police, au service national des renseignements et même à la présidence de la République [6]. Tous ces miliciens Imbonerakure, Interahamwe et ex-Mayi-Mayi portent des tenues policières ou militaires, menacent, intimident, agressent et tuent des citoyens paisibles en toute impunité avec la complicité des forces de police ou autres agents de l’État.

4. Des discours du Président de la République Pierre Nkurunziza, du président du sénat Révérien Ndikuriyo, du Président du parti CNDD-FDD au pouvoir Pascal Nyabenda et du porte-parole de ce parti Gélase Ndabirabe appellent bien à la haine et certains font recours au même jargon utilisé au Rwanda à la veille du génocide contre les Tutsi. On retiendra le plan « Safisha », « Kora », « Guguna », « Kumesa », etc.

5. Nkurunziza Pierre a divisé les forces armées burundaises dans le seul objectif de casser les équilibres établies par Arusha, d’affaiblir les FDN et ainsi instaurer un terrorisme d’État sans que celles-ci puissent intervenir de façon concertée pour stopper sa barbarie.

6. Plusieurs lois contraignantes ont été votées toujours dans cette logique d’imposer par tous les moyens ce troisième mandat « maudit » car volé. Je pense à la loi sur la presse et plus particulièrement celle annoncée par Nkurunziza dans son discours du lundi 2 novembre 2015, une loi antiterroriste qui instaurera certainement la peine de mort. Cette loi annoncée et qui sera mise en place rapidement bouclera la boucle toujours dans l’agenda caché de commettre un génocide politico-ethnique conformément aux lois élaborées par les concepteurs de ce génocide.

7. Tous ces crimes de génocide sur fond de terrorisme d’État se commettent dans un blackout total. Toutes les radios et TV privées ayant été anéanties. Les citoyens burundais n’ont plus droit à l’information à l’exception notable de celle véhiculée par les planificateurs de ce terrorisme d’Etat et de ce génocide politico-ethnique.

8. Le 6 février 2014, le Président de l’ADC-IKIBIRI, Léonce Ngendakuma adressait une correspondance au Secrétaire général des Nations-Unies dans laquelle il lançait un cri d’alarme et demandait une « prévention d’une catastrophe humanitaire en perspective au Burundi » [7].

9. La fermeture du BNUB au Burundi rentre dans cette stratégie de Nkurunziza et son parti de se préparer à commettre des crimes abominables en l’absence des témoins gênants. Les quelques observateurs des droits de l’homme de l’Union africaine qui sont au Burundi sont enfermés dans un hôtel, ils ne sortent que quand il s’agit des shows organisés par Nkurunziza et sa clique. Il semblerait d’ailleurs qu’aucun texte ne régit ce déploiement des observateurs des droits de l’homme qui ne font que compter les morts.

10. Nkurunziza et sa clique instrumentalisent plus particulièrement la justice, mais aussi l’administration, les corps de défense et de sécurité. Le pauvre Valentin Bagorikunda, procureur général de la République signe les yeux fermés n’importe quoi !

Cette liste n’est pas exhaustive.

Ce cri d’alarme est lancé à tous les hommes et femmes du monde entier en particulier ceux des pays démocratiques.

N’oubliez pas les Burundais qui, aujourd’hui, vivent dans la peur, interpellez vos gouvernements pour qu’ils interviennent de toute urgence pour stopper la folie meurtrière de Nkurunziza et son parti CNDD-FDD.

Demain, ça sera trop tard si un autre génocide est consommé en Afrique des Grands Lacs alors que tout le monde l’aura vu venir.

Que faire ?

1. Le Conseil de Sécurité des Nations Unies s’est réuni ce lundi, il faudrait de toute urgence une résolution qui autorise l’envoi immédiat d’une force de maintien de la paix au Burundi pour sécuriser la population et désarmer les milices sur tout le territoire national.

2. Il faut des sanctions immédiates contre Pierre Nkurunziza et tous les concepteurs de ce plan macabre ainsi que les exécutants. Nkurunziza n’est plus un homme crédible avec qui négocier, il faut plutôt l’arrêter vivant et le juger. Ce n’est pas pour rien qu’il se cache déjà et ne répond plus au téléphone !

Pourquoi négocier avec un criminel de son rang ? Pour lui donner des honneurs et une porte de sortie digne d’un homme responsable ? Après autant de Burundais massacrés et de sang versé de tous ces jeunes, j’ose espérer que les politiciens nous épargneront ce spectacle désolant.

L’impunité des crimes d’État doit être combattue partout dans le monde et plus particulièrement au Burundi.

3. Le Conseil de Sécurité des Nations Unies doit de toute urgence autoriser l’ouverture d’une radio privée qui couvre tout le territoire national afin de donner un message de paix, de réconfort à la population burundaise pour contrecarrer les médias de la haine contrôlés par le pouvoir, dont la RTNB.

À mes compatriotes burundais

Le peuple burundais est aujourd’hui comme un orphelin de père et de mère qui habite une région où règne la loi de la jungle et des gangsters qui rançonnent les citoyens, qui pillent, qui violent, qui torturent, qui tuent de façon abominable.

Dans cette jungle, les jeunes qui ne sont pas tués sont castrés avec de l’acide. Même des cadavres sont torturés. Des jambes sont coupées et des cœurs sont enlevés aux cadavres.

Quelle atrocité ! Du jamais vu au Burundi. Quelle haine !

Les images parlent d’elles-mêmes. Willy Nyamitwe, bras droit et conseiller principal de Pierre Nkurunziza, a beau démentir qu’il n’y aura pas de génocide au Burundi, les faits têtus sont là pour le démentir.

Le fait de tuer systématiquement des familles entières et des couples sans armes rime à quoi ?

La famille Nkezabahizi (cameraman à la RTNB) a été décimée pourquoi ?

Le père Panta Léon Hakizimana et ses deux fils jumeaux Frank et Fleury Hakizimana ont été massacrés pourquoi ?

Tous ces centaines de cadavres retrouvés ligotés, les bras au dos, c’est quoi ?

Et pourtant, tous ces jeunes qui sont préalablement arrêtés par la police, on les retrouve dans les buissons, sur les rues et dans les rivières, etc. Tous ces membres des partis d’opposition de l’UPD, du MSD, etc. qui sont assassinés à travers tout le pays, c’est quoi ?

La ligne rouge a été dépassée, en plus des discours incendiaires de Nkurunziza, de Ndikuriyo, de Ndabirabe, de Bunyoni et bien d’autres, on observe ces dernières semaines des massacres dans des endroits sacrés pour le peuple du monde entier et en particulier les Burundais, rien ne peut justifier de tirer sur un cortège funèbre, empêcher les citoyens d’enterrer leurs morts et de faire leur deuil.

Tirer un obus sur un bus avec des femmes, des vieillards, des enfants, catégories des personnes vulnérables !

Des élèves du secondaire sont enlevés de leurs classes et on retrouve leurs corps mutilés et assassinés, comme ce jeune élève du Lycée Municipal de Cibitoke !

D’autres citoyens innocents sont massacrés dans les bistrots comme ce fut le weekend passé à Kanyosha.

Que faire devant ces crimes d’État abominables et toutes ces actions de haute trahison :

1. Le Burundi appartient à tous les Burundais sans distinction aucune d’appartenance ethnique, politique ou autre. Donc, dans ces moments très difficiles, la seule arme redoutable reste l’unité, l’entraide et la solidarité. J’exhorte les membres du CNDD-FDD qui sont opposés à la destruction du Burundi comme Nation d’être les premiers à être solidaires avec ceux qui sont aujourd’hui pourchassés pour avoir refusé un mandat illégal, de trop et maudit.

2. La résistance et le refus de cette folie meurtrière incombent à tout citoyen. Le Burundi doit être libéré rapidement et se doter d’un gouvernement digne et responsable dont la première mission sera celle de sécuriser les citoyens et leurs biens, mettre hors de l’état de nuire toutes les milices qui sont sur le sol burundais : Imbonerakure, Interahamwe et les Mayi-Mayi.

3. Le Burundi est dans une situation de guerre, une situation de crise sécuritaire grave ! Nkurunziza ne décrétera jamais un couvre-feu pour des raisons que l’on peut bien deviner. À chaque compatriote burundais de prendre ses responsabilités.

Aux citoyens du monde et à la communauté internationale :

– Le peuple burundais a besoin du soutien de vous Toutes et de vous Tous. Usez de tous vos devoirs de citoyens pour faire un plaidoyer auprès de vos gouvernements pour que des mesures soient prises de toute urgence pour protéger la population burundaise en danger.

– Au lieu d’apprêter des avions pour rapatrier les étrangers vivant au Burundi et abandonner les Burundais à leur sort comme ce fut au Rwanda, prenez plutôt des mesures de sécuriser tous les habitants de ce pays.

Ça serait une honte pour les pays démocratiques de sauver uniquement les leurs et laisser les Burundais génocidés par un pouvoir que certains pays ont soutenu pendant 10 ans.

– Si rien n’est fait, et qu’un génocide politico-ethnique est consommé au vu et au su du monde entier, les survivants et les générations futures accepteront difficilement les larmes de crocodile des représentants des pays démocratiques qui auront assisté à cette hécatombe sans rien faire.

Je ne saurai terminer ce cri d’alarme sans adresser un message de sympathie à toutes ces familles qui ont perdu les leurs. Je pense aux nombreux orphelins, victimes des orphelins de 1972 comme s’ils n’avaient pas souffert de cela et comme s’il n’y en avait pas assez au Burundi.

J’ose espérer que, tôt ou tard, ces criminels seront jugés et punis sérieusement à la hauteur des crimes abominables qu’ils commettent au quotidien.

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